Vote solennel du projet de loi constitutionnelle relatif à l'équilibre des finances publiques (10 mai 2011)

Lors de mon intervention en Discussion Générale le 3 mai dans l’hémicycle, j’avais émis quelques réserves sur ce projet de loi constitutionnelle :

 

« … Trois aspects de ce texte m'inquiètent.

 

Nous continuons à casser nos instruments de politique économique.

 

Nous avons déjà entièrement abandonné le levier monétaire, et voilà maintenant que nous bridons le levier budgétaire.

 

Comment allons nous faire pour mener à bien une politique économique digne de ce nom ?

 

Je trouve que nous retouchons la Constitution avec parfois un peu de légèreté.

 

Ce n'est pas un texte anodin, et surtout, ce n'est pas seulement un texte technique

 

Par ce projet de loi, nous ne nous contentons pas de mettre en place un mécanisme, nous inscrivons aussi dans la Constitution l'objectif d'équilibre des finances publiques …

 

… Enfin, et cela a déjà fait l'objet de débats abondants, on risque de bouleverser les équilibres au sein du Parlement, en limitant encore plus les capacités d'initiative des parlementaires sur les questions fiscales, avec un poids important donné à la commission des finances.

 

Autant je suis d'accord pour rationnaliser ce qui se fait actuellement, autant les solutions proposées dans ce texte m'apparaissent trop radicales.

 

Des solutions plus consensuelles doivent être trouvées, car le texte initial n'est pas acceptable en l'état … »

 

Lien vers mon intervention vidéo du 3 mai

 

Ayant obtenu des réponses a mes questions, j’ai voté POUR ce texte … qui devra suivre un long chemin jusqu’à la réunion du Congrès à Versailles.


Ma principale interrogation concernait le monopole des PLF / PLFSS sur les questions fiscales et cotisations sociales signifiant la fin de l’initiative parlementaire :

Ce monopole a fait l'objet d’une aménagement en séance publique pour rester compatible avec le droit d’amendement et d’initiative budgétaire.  

Si le texte initial prévoyait un « monopole sec » des lois de finances et de financement de la sécurité sociale pour l’ensemble des mesures fiscales et des cotisations sociales, le dispositif a été largement assoupli.

Députés et sénateurs garderont la possibilité de déposer des propositions de loi ou des amendements comportant des éléments fiscaux :toutefois, si ces textes remettent en cause l’équilibre des lois de finances et de financement de la sécurité sociale, le gouvernement ou le président de l’Assemblée concernée pourront les déclarer irrecevables.  

Même en cas d’irrecevabilité, les parlementaires pourront toujours ouvrir le débat sur un problème financier et inviter leurs préoccupations dans le débat budgétaire en fin d’année.

Ainsi, l’objectif visé reste bien la visibilité, la cohérence et la stabilité des dépenses publiques  … et non plus le droit d’initiative des parlementaires !  

Il ne sera plus possible d’accepter des niches fiscales dans des projets de lois ordinaires sans calculer leur impact sur les comptes publics !

Pour éviter d’égrener les dépenses et d’avoir un mauvaise surprise à la fin de l’année, le débat budgétaire gardera une vue d’ensemble sur les initiatives fiscales et sociales.  

Si elle apporte une nouvelle culture du débat budgétaire, cette contrainte pèsera moins sur l’initiative des parlementaires que sur celle des ministres ! C’est avant tout pour mettre fin à la pratique des « cadeaux fiscaux » accordés dans les projets de lois ordinaires – par exemple la TVA restauration, que le débat budgétaire se verra recentré. 

Il est proposé de pérenniser un rendez-vous prévu dans le cadre de la loi de programmation 2009-2012, qui prévoit de soumettre au débat et au vote des parlementaires le programme de stabilité et de croissance avant que le Gouvernement ne le transmette à la Commission européenne. L’objectif est de mieux associer le Parlement au dialogue qui se noue chaque année entre le Gouvernement et les Institutions européennes.

Pourquoi un PJL constitutionnelle sur l’équilibre des finances publiques ?

Parce que la crise inédite que nous traversons depuis 2008 a considérablement aggravé le déséquilibre de nos finances publiques.Avec la crise, l’Etat a fait le choix d’assumer l’effondrement brutal de ses recettes, de ne pas augmenter les impôts et de préserver l’ensemble de nos amortisseurs sociaux, et c’était le bon choix : cela explique une traversée de crise moins douloureuse qu’aux Etats-Unis ou dans les autres pays européens, cela explique aussi le retour des premiers signes de la croissance. Mais si la crise était une donnée exceptionnelle qui a précipité notre déficit public à près de 7 % du PIB, notre dette à plus de 87% du PIB, il faut se rappeler que l’essentiel de ce déséquilibre reste structurel. Il est normal de s’endetter plus en temps de crise, il n’est pas normal de ne pas savoir réduire son endettement en temps de croissance économique. Or, nous sommes en déficit depuis 1975 ! Même en période de forte croissance, nous n’avons pas su fournir un effort durable de réduction du déficit public. Cette spécificité française de mauvaise gestion des hauts de cycle doit cesser, justement pour laisser à l’Etat des marges de manœuvre en cas d’éventuelles nouvelles périodes de crises.

Parce que notre dette est détenue à 70% par des investisseurs étrangers, notre intérêt est de renforcer la confiance des marchés.Si le gouvernement a fait de l’assainissement de ses finances publiques une priorité absolue, ce n’est pas punir les Français. Aujourd’hui, même les Etats-Unis se voient menacés d’une dégradation de leur note par les agences d’évaluation. Or, une défiance des marchés à l’égard d’un Etat se traduit immédiatement par une hausse des taux d’intérêt exigés sur ses emprunts publics. Evitons de voir notre signature dévaluée et notre capacité d’emprunt pénalisée par des taux d’emprunt confiscatoires ! La crise des dettes souveraines n’avance pas masquée, nos voisins qui se retrouvent au régime sec en font douloureusement les frais et obligent l’Union européenne à éteindre un incendie après l’autre.

Pour donner une assise à l’ensemble des efforts que fournit l’Etat en matière d’assainissement des dépenses publiques. Le gouvernement et la majorité ont pris leurs responsabilités sur ce sujet depuis le début du quinquennat. Des choix courageux ont été faits : la mise en place de la révision des politiques publiques qui prévoit notamment le non-remplacement d’un fonctionnaire sur deux, le report de l’âge du départ à la retraite à 62 ans, l’objectif de réduction du déficit à moins de 3% du PIB à l’horizon 2013… Pour que la France garde son rang en Europe, pour garantir la viabilité de nos acquis sociaux, il faut s’adapter ;  et parmi les évolutions qui nous semblent indispensables, le renforcement des règles budgétaires encadrant l’action des pouvoirs publics est aujourd’hui une priorité.

16:32 | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : loi, constitution, deficit, depense, budget, comptes publics | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook | |  Imprimer | | | Pin it! |