Compte-rendu des Etats généraux de l'Automobile
Après une journée d'hier particulièrement agitée à l'Assemblée, retour sur la journée de mardi consacrée aux Etats généraux de l'Automobile.
Parmi la pléiade de capitaines d'industrie, quelques haut-savoyards étaient présents à Bercy, dont Didier Sepulchre de Conde, Directeur Général de SNR.
Après les propos introductifs de Luc Chatel, rappelant les enjeux de la filière automobile, qui représente directement ou indirectement 10% des emplois en France, Carlos Gohsn, le PDG de Renault a salué, dès sa prise de parole, cette bonne initiative, qui réuni pour la première fois l'ensemble des acteurs de la filière autour d'une même table.
Carlos Goshn a rappelé le caractère brutal de la crise automobile : d'une progession de 4% des ventes sur les 3 premiers trimestres de 2008, on est passé à une baisse de 12% sur le dernier trimestre.
Cette crise touche même les pays du BRIC (Brésil/Russie/Inde/Chine) dont la progression, sur la même période, est passée de plus 25% à moins 18%.
Pour le PDG de Renault, le creux de la vague est encore à venir, avec des constructeurs fragiles qui ont perdu 150 milliards de capitalisation en 10 ans, avec 1/3 des équipementiers en difficulté et une baisse de 15% du marché prévue sur l'année 2009.
Hors l'automobile, c'est 6,4% du PIB de l'Europe et 6% des emplois (soit 12 millions de personnes) ...
En ce qui concerne Renault, la prime à la casse a eu un effet très bénéfique sur le mois de décembre, avec une progression des ventes de 32%.
Les demandes de Carlos Ghosn :
- harmonie des politiques industrielles en Europe
- harmonie des mesures fiscales (montant de la prime à la casse ...)
- assouplissement de la réglementation
- accès à un taux de crédit raisonnable (2/3 des voitures sont financées)
- mobiliser les capitaux nécessaires à la modernisation de l'outil industriel ...
Puis Günter Verheugen, vice-président de la Commission Européenne, chargé des entreprises et de l'industrie, a rappelé le souhait, en Europe, d'une industrie automobile indépendante et forte. Il a souligné le problème de sous-capitalisation des sous-traitants : sur 300 000 entreprises liées au secteur automobile, plus de 20% sont en grave difficulté.
Les proposition de Günter Verheugen :
- intervention forte de la BEI (Banque Européenne d'Investissement) en faveur du secteur automobile
- garantie du crédit aux constructeurs et aux sous-traitants (en tenant compte de la concurrence)
- incitation de la demande (casse/fiscalité/voiture verte)
- déblocage d'un budget de 5 milliards destiné à la voiture verte
Pour François Fillon, cette réunion est indispensable, car 4 écueils nous guettent :
- le laisse-faire (les industriels s'adaptent), alors que face à une crise qui dépasse le fonctionnement normal des choses, il faut la mobilisation de tous
- réagir en ordre dispersé en improvisant
- rester focalisé sur le court terme, alors qu'il faut préparer l'avenir de la filière
- mobiliser les moyens publics sans conditions : toute aide de l'Etat doit se traduire par le maintien de l'activité sur notre territoire
Il a enfin souligné l'urgence de la situation en terme de crédit : si les banques centrales ne se bougent pas, les Etats interviendront directement (on ne peut pas attendre 3 mois).
Compte-rendu sur la table ronde "Relation le long de la filière" :
Sur les 5 thèmes en discussion :
- Comment aider les constructeurs, équipementiers, sous-traitant et distributeurs à surmonter la crise de liquidité et de crédit ?
- Comment renforcer la performance du tissu de sous-traitants français ?
- Quelle évolution des relations entre constructeurs, équipementiers, sous-traitants et distributeurs ?
- Comment assurer un partage équitable des risques, des coüts et des bénéfices de l'innovation ?
- Comment renforcer la compétitivité et la performance à l'exportation des PME sous-traiatntes ?
Seuls deux ont été abordés ...
L'animateur s'est laissé déborder par des acteurs qui ont vidé leur sac.
Sur le point n°1, tout le monde s'est accordé à souligner la défiance des banques, envers le secteur automobile. Ils souhaitent la mise en place de taux bonifiés par l'Etat.
Beaucoup de sous-traitants ont également souligné les conditions drastiques imposées par les équipementiers, conditions qui conduisent, en plus de la baisse des ventes, a une trésorerie désastreuse. Il faut arrêter d'imposer des baisses de prix unilatérales. Il faut arrêter le chantage à la délocalisation.
Certains auraient souhaité un report de la mise en application de la réforme des délais de paiement.
Sur le point 2, la directrice des achats de Renault a confirmé la nécessité d'une consolidation des acteurs en France : peut-on, par exemple, se permettre d'avoir encore 43 sociétés spécialisées dans l'emboutissage en France.
Pour les sous-traitants, les constructeurs français doivent, à l'image des allemands, privilégier les achats en France. Il faut cesser de leurs imposer des quotats de sous-traitance dans les pays low-cost. Le calcul de la TP (taxe professionnelle), qui taxe les investissements, doit être revu à la baisse.
Il faut que les constructeurs s'engagent à moyen terme avec leurs sous-traitants, de façon à rentabiliser la recherche et les investissements.
Les constructeurs demandent de VRAIS interlocuteurs, au lieu d'avoir à gérer des dizaines de syndicats par filière. Ils veulent davantage de mutualisation, soulignant que certains pôles de compétitivité ont su le faire.
Il y a un véritable problème de rapport de force entre les fournisseurs de RANG 1 (qui d'ailleurs ne bénéficient plus du concours des assureurs-crédits) et les autres.
Pour finir, beaucoup de sous-traitants ont souligné que l'essaimage de toute la filière avait été organisé par les constructeurs ... qu'en les incitant a aller à tout prix à l'international, ils avaient précipité bon nombre d'entreprises familiales dans bras de fonds de pensions ... et qu'il fallait revenir à des entreprises managées par des professionnels et non par des financiers.
Voilà, voilà ... je mettrai en ligne, dans les jours qui viennent, un compte-rendu complet des débats et une synthèse complète de la journée.