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Projet de loi sur le Défenseur des droits : la vidéo et le texte de mon intervention

Je suis intervenu ce mercredi matin (à 0 heure 45 …) en discussion générale, lors du projet de loi sur le défenseur des droits.

 


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Le texte de mon intervention :

 

Monsieur le Président,

Monsieur le Ministre,

Monsieur le rapporteur,

Mes chers collègues,

 

Beaucoup de personnes s'interrogent encore sur l'apport réel de la réforme constitutionnelle votée en 2008 lors de la réunion du Congrès à Versailles. Si effectivement, cette réforme constitutionnelle n'a pas revalorisé le rôle du Parlement autant que certains l'auraient espéré, elle contient au moins deux véritables révolutions : la Question prioritaire de constitutionnalité et le défenseur des droits.

 

Nous vivons un véritable problème d'équilibre des pouvoirs dans notre 5ème république, avec un poids excessif de l'exécutif, sans réels contre-pouvoirs.

 

Ce n'est malheureusement pas le Parlement, dont la majorité est forcément très liée à l'exécutif, qui peut jouer ce rôle de contre-pouvoir qui lui est normalement dévolu par la pensée politique libérale. Il faut donc trouver autre chose.

 

Le problème est particulièrement sensible en ce qui concerne la question des libertés publiques. La France est beaucoup trop souvent condamnée par la Cour européenne des droits de l'homme.

 

Il aura quand même fallu une impressionnante série de décisions convergentes de la part du Conseil Constitutionnel, de la cour de Cassation, du Conseil d'Etat et de la Cour européenne des droits de l'homme pour en finir avec la garde à vue à la française. Et encore, il me semble que certaines administrations font encore de la résistance, alors même que la situation est devenue inacceptable.

 

Depuis que je siège dans cette assemblée, je constate que trop souvent, l'aspect « libertés publiques » est le parent pauvre des débats, ce que je déplore.

 

Que l'administration demande des moyens importants et le moins de contraintes possible, je peux le comprendre. Mais c'est à nous, politiques, de réaliser les arbitrages entre ces demandes et d'autres considérations qui pourraient s'y opposer, ce que nous ne faisons pas assez, voire pas du tout !

 

Les débats sur la LOPPSI en ont été un exemple flagrant.

 

Beaucoup de dispositions, sur le filtrage d'internet ou la vidéosurveillance, par exemple, ne répondent qu'à des demandes de l'administration, sans se poser la question de l'équilibre à trouver avec les droits des citoyens.

 

En tant que libéral, cela ne me satisfait pas.

 

Je ne me fais guère d'illusions, les ministres continueront à être trop souvent les porte-paroles de leurs administrations et ils seront suivis par les députés de la majorité, quelque soit sa couleur politique.

 

C'est le système de la 5ème République qui veut ça.

 

La solution de contre-pouvoirs extérieurs m'apparaît plus pertinente en ce qui concerne la protection effective des libertés publiques et des droits des citoyens.

 

On a donc renforcé un des contre-pouvoirs existant, le Conseil Constitutionnel. Je ne vais pas m'y attarder, mais les effets se font déjà sentir, et je pense que nous n'en sommes encore qu'au début.

 

On a également créé un autre contre-pouvoir avec ce défenseur des droits.

 

Alors que le Conseil Constitutionnel s'occupe du respect des libertés publiques lors de l'édiction des lois, le défenseur des droits s'occupera de la manière dont elles seront respectées par l'administration.

 

Pour cela, il faut des moyens, à la fois juridiques, matériels et symboliques.

 

Le texte qui nous est présenté ce soir me paraît contenir ce qu'il faut : avec des moyens matériels, par le regroupement d'entités existantes ... il garanti des pouvoirs suffisants vis à vis de l'administration, ainsi qu'un poids très fort du défenseur des droits par rapport à ses adjoints et aux différents collèges.

 

Le choix de la personnalité qui occupera ce poste jouera aussi un grand rôle. Il faudra une personnalité absolument incontestable, choisie pour son autorité morale et son attachement aux libertés. Très souvent, le premier titulaire d'un tel poste donne une orientation, une place, une visibilité que ses successeurs ont souvent du mal à infléchir : nous devront donc être particulièrement attentif lors de ce choix.

 

Toutefois, quelques interrogations subsistent.

 

Fallait-il fusionner autant d'institutions au sein de la nouvelle entité ?

 

Autant pour le médiateur de la république, le contrôleur des lieux de privations de liberté, la CNDS, la question ne se pose pas ... autant, pour la HALDE et le défenseur des enfants, il y a matière à débat.

 

L'idée de limiter le nombre d'autorités administratives indépendantes me séduit.

 

On en a créé beaucoup trop, avec une spécialisation trop forte qui amène à privilégier un angle bien précis et conduit souvent à une sorte d'osmose entre l'AAI concernée et le milieu qu'elle est censée réguler.

 

La réussite de ce défenseur des droits repose pour partie sur une taille critique, qui lui offrira une vraie visibilité médiatique et lui donnera les moyens d'agir réellement.

 

Jusqu'ici, ni la Halde, très contestée, ni le défenseur des enfants n'ont réellement émergé. Il se pourrait très bien, d'ailleurs, que les sujets qu'ils portent gagnent à être traités par le défenseur des droits, avec l'aide d'un collège spécialisé.

 

On évitera peut être également une prise de contrôle du défenseur des droits, par un milieu associatif ou un secteur professionnel, de façon là encore à réellement garantir son indépendance et donc son efficacité.

 

Mais il est clair que le coeur de métier du défenseur des droits reposant sur la défense des droits et libertés publiques du citoyens face au pouvoir, une partie des compétences de la Halde et du défenseur des enfants risquent fort de ne pas être reprises.

 

Il faudra sans doute, une fois le défenseur des droits mis en place, faire à terme le bilan des pertes effectives et décider de ce qui doit être repris, ainsi que de la forme de cette reprise.

 

Cette réforme m'apparaît importante, car elle préfigure la matrice dans laquelle s'inscriront d'autres regroupements d'autorités administratives indépendantes.

 

Le récent rapport de nos collègues Christian Vanneste et René Dosière préconise des rapprochements, qui pourront se faire sur ce modèle.

 

On définit une grande thématique, ici, c'est la défense des libertés des citoyens, plus tard cela pourra être la régulation des nouvelles technologies, dans un pôle regroupant l'ARCEP, le CSA, l'Hadopi, l'Arjel et l'ANFR ou encore les questions de transparence et de protection des données, avec la CNIL, la CADA, la CNDP.

 

Ce défenseur des droits est donc pour moi un jalon dans une réforme de fond plus globale. Il est donc essentiel de réussir sa mise en place, sous peine de compromettre la suite, car comme aujourd'hui, nous nous heurterons à des résistances qui ne manqueront pas de s'appuyer sur le bilan de la mise en place du défenseur des droits.

 

Pour toutes ces raisons, j'approuve pleinement le texte qui nous est présenté.

 

Je le voterai sans réserves.

Commentaires

  • Monsieur le Député,

    J'apprécie votre action mais les droits du citoyen dans notre pays seront respectés lorsque le Travail, la Famille Chrétienne et la propriété privée ne seront plus étouffés par le collectivisme et par les associations faux nez de l'état qui osent qualifier de raciste un citoyen né sur le sol et de sang Français et qui contribue au lieu d'être assisté c'est qui paie ceux qui lui appliquent des sévices. Monsieur de Gaulle n'avait-il pas fait écrire "Il va falloir mettre fin à l'absurdité qui veut que ceux qui doivent servir l'état son ceux qui le menacent le plus" et ce en juin 1969.
    La liberté c'est se respecter pour pouvoir respecter l'autre et savoir que sa liberté commence où s'arrête celle de son voisin. C'est tout nul besoin de Lois, d'arrêtés, d'ordonnances et j'en passe mais des lourdes sanctions pour tout citoyen qui franchit la ligne blanche, lourdes pénalités financières ou d'intérêt général que l'on soit prince ou manant. La défense des droits des droits sera illusoire tant que les institutions bloqueront toute création et activité sous prétexte que nous sommes tous comme elles des fraudeurs et des profiteurs et en plus, il faut que la justice existe et soit rendu de la même façon à Lille qu'à Marseille !

  • Monsieur le député
    J ai beaucoup apprécié le passage de votre discours consacré au respect des lois publiques et à la réforme de la garde à vue à la française. J'attire votre attention sur un problème connexe, celui des détentions abusives (détentions provisoires injustifiées et /ou d'une longueur supérieures à un an dans certaines affaires), qui sont un mal de notre époque et sont elles aussi source de nombreuses condamnations de la France par la cour européenne des droits de l'homme. Les juges de Strasbourg ne reconnaissent en effet que quatre critères pouvant justifier la détention d'une personne avant jugement, lorsqu'il subsiste des raisons plausibles de soupçonner qu'elle a commis une infraction. Il s'agit:

    * du risque de fuite
    * du risque d'entrave à la bonne marche de la justice
    * de la nécessité de prévenir la criminalité
    * du besoin de préserver l'ordre public

    ces quatre critères sont souvent bien mal interprétés par nos juges, en particulier dans le traitement de certaines affaires considérées comme sensibles où le motif de l'inculpation prime sur la réalité objective des faits.
    En particulier, le traitement des personnes arrêtées dans le cadre des procédure anti-terroristes et qui s'avèrent, statistiquement, innocentes dans plus de 95% des affaires, me parait particulièrement arbitraire et contraires au droit Européen. Le juge des libertés n'y a bien souvent qu'un rôle symbolique et s'avère incapable d'interrompre des détentions provisoires qui peuvent durer plus de deux ans. je pense que ceci est indigne d'une grande démocratie comme la France et n'honore pas notre justice.
    Cordialement
    Jean-Pierre Lees

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