Projets de loi relatifs à la transparence de la vie publique
Début de l'examen cet après-midi, en Commission des Lois, des projets de lois relatifs à la transparence de la vie publique.
304 amendements seront en discussion ... j'en defendrai 12 ... le débat risque d'être chaud, notamment sur les questions de publication des déclarations de patrimoine et de conflits d'intérêts des élus.
Sur la forme, les deux projets de loi (lois Cahuzac) ont été déposés dans l’urgence par le Gouvernement, comme s’ils pouvaient constituer une réponse crédible et efficace à « l’Affaire Cahuzac ». Plus encore, on demande aussi à la représentation nationale de légiférer dans la précipitation, puisque l’urgence a été déclarée sur ces 2 textes, sans motif légitime.
Le « Paquet électoral », ensemble de 2 textes, avait déjà permis, en avril 2011, de renforcer les pouvoirs de la Commission pour la transparence financière de la vie politique, et de créer une incrimination spécifique pour sanctionner une déclaration de patrimoine délibérément mensongère.
Loin d’instaurer une République de la transparence promise par François Hollande, ces textes, dans leur rédaction actuelle, tiennent davantage de l’instauration populiste d’un régime d’inquisition.
Sur le fond, les 2 textes renforcent significativement les obligations de transparence auxquelles sont soumis les responsables politiques, ils en confient le contrôle à une autorité indépendante, disposant de pouvoirs très importants, d’autre part ils renforcent les sanctions encourues.
Le Gouvernement propose de créer une Haute autorité de la transparence de la vie publique. Cette autorité administrative indépendante, qui remplacera l'actuelle commission pour la transparence financière de la vie politique, sera présidée par une personnalité nommée en conseil des ministres, après avis du Parlement selon la procédure de l'article 13 de la Constitution.
Les principaux responsables politiques et administratifs devront lui transmettre une déclaration de patrimoine en début et en fin de mandat ainsi qu'une déclaration d'intérêts.
Le champ l’ obligation sera sensiblement élargi par rapport au droit existant : membres du Gouvernement, parlementaires nationaux et européens, principaux responsables exécutifs locaux, membres des autorités administratives indépendantes, collaborateurs des cabinets ministériels et du Président de la République, titulaires d'emploi à la décision du Gouvernement nommés en conseil des ministres et responsables des principales entreprises publiques.
Les sanctions pénales en cas de non-respect des obligations seront renforcées puisqu'elles seront portées à 3 ans d'emprisonnement et 45 000 euros d'amende. S'agissant des membres du Gouvernement, la peine encourue en cas de déclaration mensongère sera de 5 ans d'emprisonnement et de 75 000 euros d'amende.
La Haute autorité contrôlera le respect de ces obligations et pourra demander des éléments complémentaires aux intéressés. Elle disposera à cet effet des services fiscaux, et se verra attribuer un pouvoir d'injonction. Elle pourra rendre public un rapport spécial lorsqu'elle relèvera un manquement. S'il concerne un parlementaire, ce rapport sera transmis au bureau de l'assemblée compétente qui appréciera les suites à donner. En outre, la Haute autorité pourra transmettre son rapport au parquet.
Elle pourra être saisie par le Premier ministre, les présidents de l'Assemblée nationale et du Sénat ainsi que par les associations agréées de lutte contre la corruption. Elle pourra également s'autosaisir si elle constate des manquements.
Les déclarations de patrimoine et d'intérêts des membres du Gouvernement, des parlementaires nationaux, et des principaux responsables exécutifs locaux, seront rendues publiques selon des modalités qui seront précisées par décret en Conseil d'Etat. La loi précise les éléments des déclarations qui ne pourront pas être rendus publics.
Chaque ministre nouvellement nommé fera l'objet d'une vérification de sa situation fiscale. Cette vérification se fera sous le contrôle de la Haute autorité.
Le projet de loi modifie en outre le code pénal, le code électoral et le code général des impôts afin que les élus, les ministres et les titulaires des emplois nommés en conseil des ministres puissent être condamnés à une peine d'inéligibilité définitive en cas d'infraction portant atteinte à la moralité publique, comme la corruption ou le trafic d'influence, la fraude électorale ou la fraude fiscale.
Les deux projets de loi s’attachent également à réglementer la prévention des conflits d'intérêt. Ainsi le projet de loi ordinaire introduit une définition du conflit d'intérêts de manière à prévenir « toute situation d'interférence entre un intérêt public et des intérêts publics et privés de nature à compromettre l'exercice indépendant, impartial et objectif d'une fonction publique ».
Au-delà des obligations de déclaration d'intérêts, le texte organise un système de déport, imposant aux membres du Gouvernement, aux titulaires de fonctions exécutives locales et aux membres des autorités administratives indépendantes se trouvant dans une situation de conflit d'intérêts de s'abstenir de prendre part à l'affaire ou à la décision en cause.
Il institue également un dispositif de mandat de gestion, sans droit de regard de la part des intéressés pendant toute la durée de leurs fonctions, pour les intérêts financiers détenus par les membres du Gouvernement et les membres des autorités administratives indépendantes intervenant dans le domaine économique.
L'interdiction faite par le code pénal aux fonctionnaires de rejoindre à l'issue de leurs fonctions une entreprise avec laquelle ils avaient été en relation du fait de ces fonctions sera étendue aux membres du Gouvernement et aux titulaires de fonctions exécutives locales. La Haute autorité assurera le contrôle déontologique des départs vers le privé. Les peines encourues en cas de manquement seront aggravées.
Enfin, le texte organique interdit le cumul du mandat de parlementaire avec l'exercice de toute activité de conseil ainsi qu'avec des fonctions au sein d'entreprises dont une part importante de l'activité commerciale est entretenue avec l'administration.
Les fonctionnaires élus au Parlement seront désormais placés en position de disponibilité, et non plus de détachement, pendant la durée de leur mandat.